La magie de ce lieu se confond de toute évidence avec le nom qu’on lui a donné. Autrefois considéré comme maléfique, l’endroit conserve toujours sa part de mystère, d’autant que les travaux des scientifiques n’ont pas totalement réussi à déterminer la nature réelle des eaux souterraines qui l’alimentent. On raconte aussi que le commandant Cousteau l’a lui-même exploré sans toutefois parvenir à en atteindre le fond. Il s’agit en tout cas d’une curiosité de la nature assez rare que l’on désigne sous le nom de cénote, une particularité géologique présente notamment au Mexique sur les terres des anciens Mayas. Niché sur le versant est du massif calcaire de la Clape, le gouffre est en fait né de l’effondrement d’une vaste cavité souterraine qui devait communiquer avec la mer toute proche.

L’eau qui occupe la cuvette provient à la fois du drainage des infiltrations de la Clape et de remontées marines créant un mélange faiblement salin. On la considère comme impropre à la consommation bien qu’elle ait, pendant des siècles, servi à abreuver les troupeaux des paysans voisins.

L’Oeil Doux possède un charme poétique d’autant plus troublant que derrière le calme apparent de ses eaux semble se cacher une force sournoise indéfinissable. On prétendait jadis que ceux qui osaient s’y aventuraient risquaient d’être engloutis, comme aspirés vers ses profondeurs. Leurs corps n’étaient jamais retrouvés. La possibilité d’une communication avec la mer a suffi à alimenter l’imaginaire, formant un cortège d’histoires et d’images fantastiques. Peut-être ont-elles été dénuées de vrai fondement mais il n’en demeure pas moins qu’une expérience conduite il y a quelques années permit de retrouver de l’eau colorée à la fluorescéine à quelques kilomètres du rivage, en pleine mer.

Le nom énigmatique d’Oeil Doux intrigue généralement le visiteur, ajoutant au mystère alors qu’il n’est autre qu’une francisation de l’occitan Uelh Dotz, littéralement « source résurgente », preuve que les anciens avaient de ces lieux une approche plus didactique.

Il est cependant vrai que malgré la sérénité qui s’en dégage, le gouffre ne pardonne pas à certains imprudents.